Le passé industriel régional se cherche un avenir
Caché au sein du complexe de Saint-Gobain à Aniche, un grand hangar froid abrite une des pages de la longue histoire de l'industrie régionale. C'est ici que le centre de mémoire de la Verrerie d'en haut a élu domicile. Anciens fours, verre soufflé il y a plus d'un siècle, livres de paie des anciens ouvriers... Les objets de valeur que les visiteurs peuvent contempler abondent grâce à l'implication de onze anciens ouvriers du site, désormais à la retraite. C'est justement là que le bât blesse. Le manque de renouveau au sein du bureau de l'association commence à se faire ressentir. « Certains de nos membres ont 75 ans, je m'inquiète pour l'avenir de l'association, explique son président René Diverchy.
Qu'arrivera-t-il aux pièces que nous avons amassées quand nous ne serons plus là ? Si les pouvoirs publics ne nous proposent rien, tout repartira à Blois, aux archives de Saint-Gobain. »
De multiples acteurs
Fermées pour la plupart dans les années 80, nombre d'industries traditionnelles voient disparaître leurs anciens salariés au fil du temps. À Lewarde, les mineurs qui assuraient la visite du Centre historique minier se font progressivement remplacer par des guides formés plus classiquement. Les deux structures n'ont que peu de choses en commun. Dans la région, la sauvegarde du patrimoine industriel est d'ailleurs extrêmement morcelée.
Associations, petits musées municipaux ou centres historiques de renommée régionale, les acteurs sont multiples et pas forcément faciles à coordonner. « Une toute petite association n'a évidemment pas les besoins, les projets ou les ambitions de la Cité de la dentelle à Calais », confirme Jean-Pierre Hurez, trésorier de l'association Proscitec, coordinatrice de projets en lien avec la sauvegarde du patrimoine professionnel.
Autre source d'inquiétude, la relative basse fréquentation des musées dédiés à ce patrimoine. Le tourisme du travail attire peu au vu des chiffres de fréquentation des sites. Lewarde est d'ailleurs le seul musée dédié au genre à figurer dans le top 10 du classement annuel du comité régional de tourisme. « On ne travaille pas pour être dans les dix, vingt ou trente premiers de la région, défend Karine Sprimont, directrice de la communication du Centre historique minier. Je note également que l'on ne s'en sort pas si mal puisque l'on est troisième du classement des musées. » Pour remédier à cette situation, certains musées lancent des innovations axées autour des nouvelles technologies. Ainsi, la Cité de la dentelle de Calais va inaugurer une cabine utilisant un système vidéo 3D au mois de juin. Les jeunes visiteurs pourront ainsi se faire modéliser leur silhouette en trois dimensions puis essayer virtuellement une garde-robe en dentelle. Une manière de faire venir davantage de visiteurs dans une Cité qui a vocation à en attirer davantage que les 48 084 entrées actuelles. « On est un musée encore jeune puisqu'il a été inauguré en 2009, défend Arnaud Hamy, responsable des collections techniques. Il faut donner le temps aux Nordistes pour qu'ils s'approprient le musée. » L'ancien n'en est plus à quelques années près.
L'industrie n'attire pas les foules (encadré)
Publié par le comité régional du tourisme (CRT) il y a deux semaines, le classement des sites les plus fréquentés de la région en 2010 ne donne pas vraiment la part belle à ceux mettant en valeur le patrimoine industriel. Il faut descendre jusqu'à la neuvième place pour trouver celui le plus visité. Avec 147 470 visiteurs l'année dernière, le Centre historique minier de Lewarde enregistre toutefois une baisse de 2,6 % de son nombre de visiteurs. « Le terme “patrimoine industriel” est un peu barbare et n'est pas très incitatif, concède Arnaud Hamy, de la Cité de la dentelle à Calais. Dans les villes de la région, on est entouré de marques de ce passé. On est imprégné par cela même si ça n'est pas comptabilisable en nombre d'entrées dans un quelconque musée. »