Philippe Prost (agence AAPP) est l'architecte de cette mutation. Il parle d'"un espace pensé dans son rapport à la danse". Ce ne sont pas que des mots. De vastes coursives bordées de hauts vitrages ouverts sur un jardin partagé permettent de se mouvoir sans entraves d'un espace à l'autre. "La danse envahit l'architecture", souligne le maître d'oeuvre.
Tout en respectant les besoins d'isolement requis pour chaque univers de travail, le dessin architectural, simple, crée un lien organique entre les vastes plateaux de répétition installés sous l'ancienne charpente de fer et le studio-scène de 180 places, cube noir enserré dans un coffret de zinc. Mieux, les volumes sont considérés comme des supports d'expression potentiels, y compris le jardin, confié à l'artiste paysager Patricia Perrier, qui permettra de présenter des performances in situ.
Fondée en 1868 sous le Second Empire, la briqueterie a cessé son activité en 1966. Jusqu'à 120 000 pièces ont été produites ici chaque jour, qui ont notamment permis le parement d'hôpitaux, de centraux téléphoniques, de casernes et d'écoles de la région parisienne. Il n'en restait que le bâtiment et son appareil de briques noircies dont sa haute cheminée qui fait fonction d'amer urbain pour qui vient de Paris, depuis la porte de Choisy toute proche.
Refus du façadisme
L'architecte s'est fait discret, sans s'effacer. Il a voulu conserver le caractère brut de la construction originelle. Il a notamment refusé le choix du façadisme, pratique de construction consistant à ne conserver que l'apparence extérieure des édifices. "Le bâtiment existant offrait des qualités qu'aurait rabotées un projet ex nihilo", indique Philippe Prost.
L'option s'est aussi avérée plus économique. A la Briqueterie, près de 30 % des éléments de structure d'origine ont été conservés : certains voûtains en brique (ondulations caractéristiques des plafonds des caves anciennes), la majestueuse charpente métallique aux courbes quasi mauresques qui enveloppe les plateaux, jusqu'au socle extérieur de construction en pierre, nettement visible du côté de la rue Robert-Degert, point d'entrée dans les lieux.
Le bâtiment long de 50 m occupe une position charnière entre l'ancien site industriel et la ville de Vitry. Cette situation a facilité le "choix d'ouverture" voulu par les maîtres d'ouvrage et relayé par l'architecte. Ainsi, le nouveau siège du CDC a fait de son parvis couvert, et ouvert sur la rue, une scène potentielle que complète un simple gradin de béton peint. Ici le rouge brique domine. La même couleur est appliquée sur le sol et accompagne le franchissement de l'entrée, jusqu'au hall d'accueil, une façon simple et délicate d'inviter le curieux à poursuivre sa marche vers l'intérieur.
Cette Briqueterie, un homme l'a rêvée avec férocité et détermination pendant des années. Michel Caserta (...)
La Briqueterie, 7, rue Robert-Degert, Vitry-sur-Seine (94). Tél. : 01-46-86-17-61. Alabriqueterie.com