« L’industrie, patrimoine et culture » 2012
Séminaire de recherche Région Ile-de-France / Université Paris I Panthéon-Sorbonne
Vendredi 11 mai 14h30-17h30
Enjeux et critères de la sauvegarde du patrimoine industriel
Région Île-de-France 33, rue Barbet de Jouy 75007 Paris salle 100
Contact : Nicolas Pierrot - industrie-patrimoine-culture@iledefrance.fr - 01.53.85.75.04
1) Paris : une capitale industrielle qui s’ignore ?
Jean-François Belhoste, directeur d’études à l’Ecole pratique des hautes études (EPHE)
Paris a mis en valeur quelques témoins significatifs de son passé industriel : Grands Moulins ; ancienne fabrique d’instruments à vent Couesnon, devenue Maison des Métallos ; Cour de l’Industrie, dans le faubourg Saint-Antoine… Mais s’ils attestent qu’il y a bien eu une industrie à Paris, ils ne nous disent rien de son importance, de sa diversité et du rôle qu’elle a pu jouer dans le développement de la ville. Paris, en effet, a du mal à s’assumer comme une ancienne grande ville industrielle. Les statistiques historiques – nombre d’établissements, nombre d’ouvriers… – en apportent pourtant la preuve. Mais sans doute pour emporter la conviction, est-il nécessaire d’aller au-delà des chiffres et de montrer comment concrètement bâtiments et machines se sont inscrits dans l’espace et ont façonné le territoire urbain. La quête méthodique de telles traces peut alors révéler bien des surprises.
Paris 11e, rue du faubourg Saint-Antoine, Cour des Bourguignons. Cet ensemble construit entre 1860 et 1880 est caractéristique, comme la Cour de l’industrie (rue de Montreuil), des cours du faubourg associant ateliers de menuiserie, magasins et logements (NP). Actuellement Lieu du Design en Île-de-France. © Région Île-de-France, Patrimoines et Inventaire, Jean-Bernard Vialles, ADAGP, 2009.
2) Sauvegarder ou protéger le patrimoine industriel
Claire Vigne-Dumas et Hélène Jantzen, chargées du recensement, DRAC Île-de-France, Conservation régionale des Monuments Historiques
La sauvegarde du patrimoine industriel est un des enjeux majeurs de l’évolution du paysage francilien depuis une vingtaine d’années. Sous la pression économique et foncière, la question du devenir des sites industriels connaît à l’heure actuelle une acuité croissante.
La conservation régionale des monuments historiques est sollicitée pour assurer la protection des édifices menacés, en appliquant le code du patrimoine régissant l’inscription ou le classement au titre des monuments historiques.
Au travers de la présentation d’un certain nombre de sites industriels, envisagés au titre de la loi comme « immeubles », notre intervention montrera quels facteurs ont permis la sauvegarde totale ou partielle de ces ensembles ; elle s’attachera à définir si la protection au titre des monuments historiques s’est révélée utile à leur sauvegarde ; si la loi est un préalable nécessaire ou non à une reconversion respectueuse de l’architecture et de la mémoire qui s’y rattache. La protection au titre des monuments historiques des ensembles industriels n’est, en effet, le plus souvent pertinente que si elle s’inscrit dans un projet urbain porté tant par le propriétaire, qu’il soit privé ou institutionnel, que par les collectivités territoriales.
La halle des anciennes messageries de la gare d’Austerlitz, construite par l’ingénieur Eugène Freyssinet en 1929, inscrite au titre des monuments historiques en mars 2012 (ZAC Rive Gauche, Paris 13e)
3) Quel(s) rôle(s) pour les associations dans la sauvegarde du patrimoine industriel ?
Antoine Monnet, président de l’association « La Fabrique », Meudon (Hauts-de-Seine), et Michel Vial, président de l’association « Un avenir pour Guitel », Le Pré Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis)
Plaçons, pour cette dernière séance, les jeux d’acteurs au centre du cercle. En effet, pour obtenir la distinction d’un bâtiment au rang de patrimoine – singu-lièrement lorsqu’il s’agit d’une usine et de ses équipements – l’expertise ne saurait suffire : il faut compter avec les propriétaires, avec la population et ses représentants, avec les institutions. Quel peut être le rôle – et le poids – des associations dans cette partie souvent complexe ?
Les arguments et les ferments de l’action militante sont assurément historiques et mémoriels, mais également juridiques et institutionnels, et se doivent surtout d’être inventifs : il s’agit, pour s’opposer à la démolition ou à la dénaturation, de concevoir des alternatives crédibles, des projets de reconversion respectant la signification des lieux tout en assurant leur pérennité économique et territoriale (valeur d’usage) et leur force identitaire (valeur symbolique). A travers deux exemples de combats récents, Antoine Monnet et Michel Vial reviendront sur la variété des situations locales, et s’interrogeront sur les rôles respectifs des différents intervenants dans le dénouement des luttes patrimoniales.
Le Pré Saint-Gervais (93), ancienne usine de construction mécanique Rateau (rue Carnot côté Ouest, 1917), puis Guitel-Etienne. © Région Île-de-France, Patrimoines et Inventaire, Laurent Kruszyk, ADAGP, 2005.
Meudon (92), l’ancienne cartoucherie Gaupillat, avant sa démolition en avril 2011. © Région Île-de-France, Patrimoines et Inventaire, Philippe Ayrault, ADAGP, 2008.